La stratégie de saturation russe fonctionne-t-elle?

La Russie continue de progresser à un rythme soutenu mais ne parvient pas à réaliser des gains stratégiques significatifs.

Article publié le Jun 30, 2025
Sebastien Masson
Deuxième année à Sciences Po Strasbourg
Pour citer ce baratin :
Sebastien Masson,"La stratégie de saturation russe fonctionne-t-elle?", [en ligne] BARA think tank, Jun 30, 2025, "https://www.bara-think-tank.com/baratin/la-strategie-de-saturation-russe-fonctionne-t-elle"

Des progrès relativement importants

Si l’on regarde la superficie gagnée par les Russes, le mois de juin se situe dans la moyenne haute des 8 derniers mois et est le 2e mois le plus difficile de 2025 pour les Ukrainiens avec plus de 450 km² capturés.

L’effort russe a été assez important : 1200 assauts hebdomadaires en moyenne sur la période mai-juin contre moins de 950 sur la période mars-avril, soit une hausse de 25%. Sans surprise, ces derniers se concentrent sur l’oblast de Donetsk (Pokrovsk, Novopavlivka, Toretsk…)  

L’oblast de Donetsk dans le viseur

Le gros des gains russes se situe au sud de Novopavlivka, dans l’oblast de Donetsk. Les troupes russes ont remonté la rivière Morki Yali et ont pu profiter d’un terrain légèrement avantageux pour capturer plus de 130 km².

À l’inverse, du côté de Pokrovsk, qui concentre ⅓  des efforts russes depuis de nombreux mois, la Russie n’a peu voire pas progressé, que ce soit sur les flancs de la ville ou face à elle directement. 

Du côté de Soumy et Koupiansk

Au nord du front, à Soumy, la Russie a réalisé des progrès significatifs au début du mois. Toutefois, l’Ukraine conteste son initiative en lançant des assauts localisés sur son territoire. La Russie adopte désormais une tactique similaire au sud-est de la zone. 

Au nord de Koupiansk, la Russie a réussi à capturer le village de Kindrashivka, lui donnant ainsi accès à un axe routier vers la ville. Ce progrès doit néanmoins être nuancé puisque l’axe est déjà probablement miné par les Ukrainiens. 

Les difficultés ukrainiennes à Kostiantynivka

En revanche, les Ukrainiens souffrent depuis mai sur le front de Kostiantynivka. Après la percée russe au mois de mai au sud de Yablunivka, ainsi que l’érosion des défenses ukrainiennes dans la périphérie de Toretsk, c’est Tchassiv Yar qui souffre aujourd’hui. 

En effet, les Russes sont parvenus à consolider leurs positions dans le centre-ville. Ils ont également mené une incursion réussie dans la banlieue sud de la ville, menaçant ainsi les Ukrainiens sur un nouveau flanc. 

Une avancée russe en demi-teinte

Par ailleurs, la Russie a réussi à faire la jonction avec l’oblast de Dniepr, victoire symbolique sans portée stratégique, contrairement aux nombreuses opérations dans la profondeur conduites par le renseignement militaire ukrainien. 

En réalité, l’avancée russe dans l’oblast de Donetsk se compose majoritairement de petites percées, comme au sud de Novopavlivka ce mois-ci ou au de Yablunivka au mois dernier. L’érosion des défenses ukrainiennes mène à donc à des affaissements par endroits. 

Quand l’attrition devient  saturation

La nouvelle stratégie mise en place par la Russie pourrait expliquer cette dynamique. Les troupes russes sont dans une logique de saturation extrême : bombarder une position par des drones et de l’artillerie avant d’y envoyer des véhicules faiblement blindés mais très rapides. 

La Russie a recours de manière toujours plus importante aux drones et aux véhicules non-blindés, tandis que le recours aux véhicules blindés est quant à lui en baisse : l’attrition poussée à l’extrême selon une logique de rationalisation des coûts permet la saturation.