L’ambition d’une industrie véritablement européenne

Reprenons depuis le début. Au début des années 2010, les principales puissances européennes que sont la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, cherchent à co-développer des plateformes communes pour leurs futures générations de chars, de chasseurs…

Les objectifs sont multiples : économiser des frais de développement en mutualisant les coûts, accroître la coopération entre les industries européennes ou encore permettre une meilleure interopérabilité entre leurs armées. Plusieurs projets voient alors le jour. 

SCAF et MGCS : le futur de l’Europe

Dans le cas de la France, on peut parler de 2 projets principaux : le SCAF ( Système de Combat aérien du Futur) développé avec l’Espagne et l’Allemagne et le MGCS (Main Ground Combat System) développé avec l’Allemagne. Que se cache-t-il derrière ces acronymes?

Prenons l’exemple du SCAF. Ce dernier n’est pas un avion de combat au sens classique du terme mais bel et bien un système de combat, pensé à travers un binôme connecté : chasseur et drone. L’objectif est de permettre à l’Europe de rivaliser dans les airs avec la Chine et les États-Unis. 

Des difficultés dès la conception

Toutefois, tout ne se passe pas comme prévu. Plusieurs difficultés apparaissent dès la conception de ces appareils. Reprenons l’exemple du SCAF : la France, puissance nucléaire, veut faire du chasseur un vecteur pour l’arme nucléaire, et ce contrairement à l’Allemagne. 

Pour reprendre les mots d’Eric Trappier, PDG de Dassault : “Il faut négocier en permanence”, ce qui allonge grandement les délais, génère des frustrations… Il en va de même pour le MGCS où c’est la question de l’exportation du char qui pose souci. 

Des retards sources de replis nationaux

Le développement des programmes est donc bien en retard. Dans le cas du SCAF, son démonstrateur devait initialement voler en 2026, c’est aujourd’hui 2029 qui est annoncé. Le MGCS quant à lui, serait livré en 2040, 5 après la date initialement annoncée. 

 Face à cela, les industriels et les Ministères de la défense s’interrogent. Début mai, Éric Trappier annonçait que la France était en mesure de construire le SCAF seul. Aujourd’hui, c’est l’Allemagne qui annonce le lancement du projet MARTE concurrent au projet MGCS

Ce que l’histoire peut nous apprendre

Ce n’est pas la première fois que plusieurs pays s’associent afin de créer un équipement militaire commun : MBT-70, Eurofighter… Plus récemment le drone nEUROn a été financé en majorité par la France, mais a été le fruit de la coopération de la Suède, de l’Italie, de la Grèce, de la Suisse et de l’Espagne. 

En réalité les principales de ces programmes s’axent autour de leur gouvernance, de la manière de décider l’orientation et le développement des équipements. La trop grande horizontalité de ces programmes entre les pays Européens devient alors leur plus grande faiblesse. 

Des menaces pressantes

En résumé : les retards s’accumulent et avec eux les difficultés budgétaires grandissent tandis que l’Europe s’isole de plus en plus. L’impérialisme russe continue de peser sur le flanc est tandis qu’à l’ouest, les États-Unis s’affichent de moins en moins comme un partenaire. 

Certains pays ont même déjà quitté le navire : la Pologne s’est rapprochée de la Corée du Sud pour ses chars tandis que la Suède et le Royaume-Uni coopèrent désormais avec le Japon pour leur programme GCAP. Alors l’heure est-elle au réveil ou à la sieste pour l’Europe?