Kohler et Paris : otages victimes de la terreur iranienne

Deux citoyens français, Cécile Kohler et Jacques Paris, sont détenus en Iran depuis mai 2022. Accusés d’espionnage, ils deviennent des pions diplomatiques.

Article publié le Jul 04, 2025
Théo Lutz
Première année à Classe préparatoire hypokhâgne AL Strasbourg
Pour citer ce baratin :
Théo Lutz,"Kohler et Paris : otages victimes de la terreur iranienne", [en ligne] BARA think tank, Jul 04, 2025, "https://www.bara-think-tank.com/baratin/kohler-et-paris-otages-victimes-de-la-terreur-iranienne"

Arrestation arbitraire et détention politique

Le 7 mai 2022, alors qu’ils voyagent en Iran en tant que simples touristes engagés et enseignants syndicalistes, Cécile Kohler et Jacques Paris sont arrêtés. Très vite, Téhéran les accuse d’appartenir au Mossad, les services secrets israéliens. L’ombre de la manipulation plane.

Leur détention ne relève pas d’un processus judiciaire équitable. Aucun procès n’est engagé, et leur avocat n’a pas accès au dossier. Le régime iranien les utilise comme monnaie d’échange, dans une stratégie de “diplomatie de l’otage” dénoncée par plusieurs ONG.

Un récit iranien construit et rediffusé

Le 2 juillet 2025, la télévision d’État iranienne diffuse une vidéo où les deux otages “avouent” être des espions. Les plans sont coupés, les regards sont fixes, la mise en scène est sinistre. Tout indique des confessions forcées, destinées à asseoir une version officielle.

Ce récit s’inscrit dans une stratégie plus large du régime : créer un ennemi intérieur et extérieur pour détourner l’attention de la crise économique, sociale et politique que traverse l’Iran. L’accusation d’espionnage sert ici une dramaturgie sécuritaire dénuée de preuves.

La réaction française : fermeté et limites

Le 3 juillet 2025, Emmanuel Macron sort de son silence. Il qualifie les accusations d’“inacceptables”, évoque “des mesures de rétorsion” et affirme que la France ne laissera pas deux de ses ressortissants servir de levier politique. Une fermeté rare dans ce genre d'affaires.

Pourtant, les marges de manœuvre sont étroites. La France est contrainte d’équilibrer pression et diplomatie. Trop de tension pourrait aggraver le sort des otages. Trop d’attentisme risquerait de banaliser une détention abusive. C’est une ligne de crête difficile à tenir.

L’escalade verbale : chacun durcit le ton

Téhéran ne recule pas. Au contraire, le ministère iranien des Affaires étrangères confirme l’inculpation et accuse Paris d’“ingérence”. Face à l’inflexibilité française, le régime iranien redouble de propagande et tente d’internationaliser l’affaire à son profit.

Ce face-à-face vire au bras de fer diplomatique stérile. Ni Paris ni Téhéran ne veulent céder. La logique de surenchère étouffe toute possibilité de médiation. Ce sont Kohler et Paris qui en paient le prix : leur vie est suspendue aux intérêts d’États qui ne dialoguent plus.

L’oubli, l’attente, la lutte des proches

Depuis deux ans, les familles de Cécile Kohler et Jacques Paris vivent dans l’attente. Les nouvelles sont rares, les conditions de détention restent floues. L’isolement est total. Les proches dénoncent une forme de torture psychologique orchestrée par le silence iranien.

Face à l’impuissance politique, la société civile tente d’agir. Une pétition circule, les syndicats se mobilisent, des parlementaires interpellent le gouvernement. Mais cette mobilisation reste en marge du jeu diplomatique, où l’humain passe après les rapports de force.

Une stratégie iranienne du chantage étatique

Depuis plusieurs années, l’Iran a multiplié les arrestations arbitraires de binationaux ou d’étrangers. Cette politique est cynique mais efficace : elle permet d’obtenir des concessions ou de faire pression sur des États jugés hostiles au régime théocratique.

Cette stratégie du “kidnapping d’État” transforme les frontières du droit international. L’individu devient un levier. Kohler et Paris ne sont pas les seuls : d’autres Européens sont également retenus. L’Iran agit ici comme une puissance qui nie la souveraineté de l’autre.

Une fracture géopolitique durable

L’affaire Kohler/Paris révèle une dégradation plus large des relations entre l’Iran et l’Europe. À la crise nucléaire s’ajoute désormais une crise humanitaire. La diplomatie du dialogue est remplacée par une logique de confrontation et de sanction.

Pour la France, l’enjeu dépasse les deux otages, il s’agit aussi et surtout de défendre un principe. Aucun citoyen ne peut être l'instrument d'un régime tyrannique obsédé par sa survie et connu pour ses pratiques inhumaines.

Afficher les sources

France Info, « Il n’y a pas vraiment de signaux d’espoir » : le calvaire de Cécile Kohler et Jacques Paris, otages en Iran et inculpés pour espionnage, 3 juillet 2025.
Disponible en ligne : https://www.franceinfo.fr/monde/iran/recit-il-n-y-a-pas-vraiment-de-signaux-d-espoir-le-calvaire-de-cecile-kohler-et-jacques-paris-otages-en-iran-et-inculpes-pour-espionnage_7352574.html

La Dépêche, Entretien. Iran : “Cécile Kohler et Jacques Paris, espions du Mossad ? Le régime iranien sert son récit et agit en voyou”, 4 juillet 2025.
Disponible en ligne : https://www.ladepeche.fr/2025/07/04/entretien-iran-cecile-kohler-et-jacques-paris-espions-du-mossad-le-regime-iranien-sert-son-recit-et-agit-en-voyou-12803848.php 

Le Figaro, « Chaque camp se livre à une surenchère réciproque » : bras de fer entre Téhéran et Paris sur les otages français, 3 juillet 2025.
Disponible en ligne : https://www.lefigaro.fr/international/chaque-camp-se-livre-a-une-surenchere-reciproque-bras-de-fer-entre-teheran-et-paris-sur-les-otages-francais-20250703 

Le Monde, Emmanuel Macron menace l’Iran de mesures de rétorsion s’il maintient l’inculpation d’espionnage contre deux Français, 3 juillet 2025.
Disponible en ligne : https://www.lemonde.fr/international/article/2025/07/03/emmanuel-macron-menace-l-iran-de-mesures-de-retorsion-s-il-maintient-l-inculpation-d-espionnage-contre-deux-francais_6617733_3210.html