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Le chancelier allemand Friedrich Merz, dans un changement de rhétorique par rapport à son prédécesseur Olaf Scholz, a félicité celui-ci pour sa gestion de l’agression russe en Ukraine.
Le nouveau chancelier, issu du même parti qu’Angela Merkel, semble pourtant rompre avec l’approche militaire de l’ancienne dirigeante. En effet, c’est sous l’impulsion de Friedrich Merz que la question de la conscription est revenue au premier plan du débat politique. Face à une menace russe grandissante, le chef du gouvernement – millionnaire et conservateur affirme vouloir disposer de « la plus grande armée conventionnelle du continent ». Une déclaration qui, il y a moins d’un siècle, aurait scandalisé les voisins européens, mais qui aujourd’hui choque avant tout la population nationale et fracture les débats au Bundestag.
À partir de 2026, tous les jeunes hommes âgés de 18 ans devront répondre à un questionnaire évaluant leur motivation et leurs compétences pour le service militaire. Ce questionnaire, facultatif pour les femmes, servira d’outil afin de constituer un vivier de personnes potentiellement mobilisables en cas d’agression ou de menace grave contre le pays.
Cette réforme s’inscrit dans le contexte d’un renforcement de la Bundeswehr face aux nouvelles tensions géopolitiques, notamment depuis la guerre en Ukraine. Le gouvernement allemand cherche à combler un déficit de recrutement au sein de l’armée et à garantir une capacité de défense plus robuste.
Bien que le service reste officiellement basé sur le volontariat, la nouvelle loi inclut une clause permettant d’introduire, si nécessaire, une forme de conscription partielle ou générale. En cas d’objectifs de recrutement non atteints, un amendement pourrait rétablir un service militaire obligatoire, suspendu en Allemagne depuis 2011.
Le ministère de la Défense justifie cette mesure par la nécessité d'assurer une « préparation nationale à la défense » et de disposer rapidement de réserves mobilisables. Des formations civiles de protection ou de secours pourraient également être proposées comme alternatives pour ceux ne souhaitant pas intégrer les forces armées.
Berlin espère ainsi porter la Bundeswehr à 260 000 hommes avec 200 000 réservistes d’ici 2035, surpassant ainsi les 200 000 actifs et 40 000 réservistes de l’armée française.
La question autour du potentiel amendement reste non seulement vague, mais inquiète la population. L’amendement prévoirait en effet un retour au service militaire obligatoire en cas de « crise majeure » ou si les objectifs de recrutement ne sont pas atteints. Le terme « crise majeure », étant laissé volontairement flou, alimente la crainte d’un retour déguisé à la conscription et remet en cause la tradition pacifiste instaurée en Allemagne depuis 1945.
De plus, de récentes informations indiquent que les conservateurs du CDU/CSU entreprendraient de mettre en place un système de tirage au sort, inspiré du modèle danois. L’absurdité de la mesure a déjà rapidement été pointée du doigt par les opposants assis tout à gauche de l’hémicycle, Comme l’a dénoncé Jan Van Aken (Die Linke) : « Ceux qui n’ont pas de chance devront aller à la guerre et mourir ». Le partenaire de coalition du CDU/CSU, à savoir les sociaux-démocrates du SPD, a, par le biais du ministre de la Défense Boris Pistorius, également remis en cause l’utilité, la logique et la crédibilité de cette mesure et de son instauration en Allemagne, illustrant un clivage gouvernemental autour de la question de la défense nationale.
L’inexactitude des sondages fait planer le doute quant à l’acceptation nationale concernant le service militaire. Si un sondage du Stern affirme que 54 % des Allemands sont favorables au service militaire, la jeunesse s’exprime plutôt défavorablement. Le même sondage indique 63 % de refus chez les 18-29 ans, un chiffre qui est de 57 % selon un sondage mené par Greenpeace.
La jeunesse allemande, profondément divisée politiquement avec un vote croissant pour l’AfD chez les jeunes hommes et pour Die Linke chez les jeunes femmes, dénonce un gouvernement jugé gérontocratique, déconnecté de ses réalités et de ses priorités.. L’organisation de jeunesse du SPD (JUSOS) a elle-même plaidé pour un non-retour d’un service obligatoire, avançant la continuité du modèle axé sur le volontariat.
Si le chef du gouvernement plaide pour une force par le nombre, il demeure normal de questionner la cohérence de cette thèse. Se doter de la plus grande armée continentale au XXIe siècle relève d’une vision arriérée des relations internationales, selon certains critiques. Pourquoi privilégier une armée de masse plutôt que de moderniser les capacités non conventionnelles de défense cyber, renseignement, logistique, aujourd'hui essentielles dans les conflits contemporains ?? La dépendance envers des services secrets étrangers, la vétusté de certains équipements et l’absence de souveraineté dans le cyberespace ou le renseignement géospatial soulèvent des doutes sur l’utilité d’une armée conventionnelle forte. Cette interrogation est d’autant plus pertinente que l’Allemagne, contrairement à la France ou au Royaume-Uni, intervient rarement à l’étranger (en matière de combat), contrainte par sa tradition pacifiste d’après-guerre et la tutelle de ses deux chambres législatives.
Ce qui demeure réel est que l’Allemagne court après son rôle de puissance mondiale. Installée comme puissance européenne indiscutable, sa place mondiale reste une question sans réponse. Première puissance économique européenne, symbole d’une rigueur budgétaire, ses capacités militaires font l’objet d’une utilisation des moyens financiers questionnables, bien loin du modèle français, destiné à faire de la France une puissance dissuasive et réelle dans la majorité des leviers du schéma militaire. Le récent déploiement d’une brigade allemande dans les pays baltes, confrontée à des problématiques logistiques, témoigne d’une volonté de hard power soumise à un besoin de réforme massive. Or, la nation de l’innovation ne parvient toujours pas à proposer un modèle semblant adéquat aux problématiques modernes. La justification posée par la guerre en Ukraine et les avertissements lancés par les services de renseignement quant à l’imminence d’une confrontation avec Moscou pour rétablir un nouveau modèle de recrutement est entendable. Elle reste cependant confrontée au besoin de prendre en compte la jeune société civile, aujourd’hui plus que jamais détachée de l’idéalisme patriotique et de l’idée de défense nationale par les armes.
Sources: Spada, E. (2025, 16 octobre). Service militaire en Allemagne : pour gonfler ses effectifs, l’armée envisage de « tirer au sort » les futurs appelés. Libération. https://www.liberation.fr/international/europe/service-militaire-en-allemagne-pour-gonfler-ses-effectifs-larmee-envisage-de-tirer-au-sort-les-futurs-appeles-20251016_KNN4SKNOWRDWPEVAP4MSOW6GME/
Tagesschau.de. (2025, 14 octobre). CSU verteidigt Losverfahren für Wehrdienst. Tagesschau. Per Los zum Wehrdienst: CSU verteidigt Pläne | tagesschau.de
Cappellini, A. (2025, 17 octobre). Une idée "macabre"? L'Allemagne qui veut avoir "l'armée la plus puissante d'Europe" réfléchit à introduire un tirage au sort pour forcer les jeunes à faire le service militaire. BFM Business. https://www.bfmtv.com/economie/international/une-idee-macabre-l-allemagne-qui-veut-avoir-l-armee-la-plus-puissante-d-europe-reflechit-a-introduire-un-tirage-au-sort-pour-forcer-les-jeunes-a-faire-le-service-militaire_AV-20251017-001
Fabian, S. (2024, 23 avril). The Illusion of Conventional War: Europe Is Learning the Wrong Lessons from the Conflict in Ukraine. Modern War Institute. https://mwi.westpoint.edu/the-illusion-of-conventional-war-europe-is-learning-the-wrong-lessons-from-the-conflict-in-ukraine/
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